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Numérisation, usages et enjeux de propriété : propriété intellectuelle vs propriété matérielle[modifier | modifier le wikicode]

Sofia Roumentcheva/s.roumentcheva(a)abv.bg

La numérisation1 du patrimoine culturel est un élément clé de la transformation des structures patrimoniales dans la société de l’information. Au-delà de la fonction première d’archivage et de conservation, il s’agit d’un important outil d'étude à disposition des chercheurs, de médiation pour le public et d’un précieux moyen au service de la création.

L'appréhension de la numérisation, de ses ressorts et de ses conséquences dans toute leur complexité, suppose l’étude des enjeux juridiques qu'elle soulève. Parmi les différentes problématiques qui pourraient se poser, la question de la propriété est essentielle. Le droit du propriétaire d'user, jouir et disposer2 de son bien lui permet de déterminer à la fois son existence et son devenir. La compréhension des enjeux de propriété liés à la numérisation est donc indispensable aussi bien pour les institutions que pour les utilisateurs.

La numérisation est à la fois une reproduction d’une œuvre préexistante et un acte de création d’un objet numérique à statut juridique propre. Les rapports qu’entretiennent ces deux objets et leurs propriétaires respectifs peuvent être complexes. Ils sont susceptibles de faire interagir plusieurs régimes de propriété différents qui s’exercent de manière concomitante sur un même support : de la propriété corporelle d’un côté et de la propriété incorporelle d’un autre. Ainsi, d'un côté, la numérisation est soumise au droit d’auteur de l’œuvre reproduite et donc dépendante des titulaires des droits. D'un autre côté, l’objet numérique, dans sa matérialité est parfois à la croisée des droits de plusieurs propriétaires, aussi bien publics que privés. ( à modifier)

L’image, vecteur de circulation du patrimoine par excellence peut se trouver ainsi « piégée » dans un statut juridique complexe. Les différents régimes de propriété se superposent et s'emboîtent telle une poupée russe. Cela est susceptible de nuire à la compréhension du statut légal de l'œuvre numérisée et par conséquence à la transmission du patrimoine culturel. L’étude des problématiques de propriété semble donc être un préalable essentiel à la bonne exécution des missions des institutions patrimoniales dans le respect des droits des différentes parties prenantes.

Après une brève revue de la législation concernant la numérisation du patrimoine culturel (I), il convient de s’intéresser plus particulièrement aux droits de propriété intellectuelle sur les œuvres numérisées (II), pour ensuite évoquer les droits de propriété sur la numérisation (III).

Préliminaire : Le cadre légal de la numérisation du patrimoine[modifier | modifier le wikicode]

Le droit s’est saisi de la question de la numérisation du patrimoine culturel à travers une législation aussi bien sur le plan national, qu’européen et international.

1. Le paysage juridique français[modifier | modifier le wikicode]

En France, la numérisation du patrimoine est considérée comme un vecteur par excellence de la transmission de la culture. Ainsi, elle va de pair avec une politique d’ouverture des données publiques.

1.1 Mise en place d’une politique de numérisation généralisée[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation des collections patrimoniales en France a été généralisée dans les années 1990. Pilotée au niveau national par le ministère de la Culture, elle a concerné dès la 1996 la numérisation des fonds iconographiques et sonores de l’État, pour être ensuite élargie aux fonds des collectivités locales, fondations et associations à partir des années 20003.

Le plan d’action « Préparer l’entrée de la France dans la société de l’inform@tion »4 (1997) retrace les principaux objectifs d’une politique d’ampleur de numérisation. Il s’agit tout d’abord de favoriser l’accès au patrimoine à travers sa mise en ligne, ainsi que d’assurer sa valorisation scientifique par la constitution de bases de données iconographiques. La numérisation est également présentée en tant qu’outil de maîtrise du patrimoine afin de prévenir toute « tentative de privatisation » de celui-ci. De manière indirecte, elle permet la valorisation commerciale du patrimoine par les institutions à travers la vente de reproductions et l’exploitation des droits.

En 2018 a été lancé le Programme national de Numérisation et de Valorisation des contenus culturels pour l’utilisation, la diffusion et l’accès dans un objectif de démocratisation et d’éducation artistique et culturelle.

1.2 La numérisation au service d’une politique d’ouverture des données publiques[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation est un préalable nécessaire à une politique d’ouverture des données publiques. Le cadre juridique et réglementaire de « l’open data » est abondant et complexe et dépasse largement le domaine des données culturelles.

Le droit d’accès aux documents administratifs a été institué par la loi dite CADA5. Par la suite, avec le développement de la société d’information, émerge graduellement la question de la réutilisation des données publiques6 dont les modalités et le principe de gratuité ont été progressivement mis en place7. Enfin, la loi pour une République Numérique8 du 7 octobre 2016 a favorisé l’intensification du mouvement de « l’open data » en instituant le principe de l’ouverture des données par défaut qui devient donc la règle et non plus l’exception. Cette réforme concerne directement une grande partie des institutions patrimoniales9.

Plusieurs rapports relatifs aux données publiques culturelles ont été produits10 par le ministère de la Culture en faveur de l’ouverture des données publiques culturelles afin d’améliorer la visibilité des œuvres et favoriser les partenariats et la création. Est notamment privilégiée la diffusion des données sous licences libres. Á cette fin a été mise en place une plateforme de données culturelles ouvertes : data.culture.gouv.fr.

Les données concernées par la législation sur « l’open data » sont définis de manière très large et sont donc susceptibles d’inclure les copies numériques des collections patrimoniales. Cependant, l’accès et la réutilisation de ces données sont intimement liés à celle de la propriété, aussi bien matérielle et immatérielle, des œuvres numérisés et des copies numériques. Ainsi, le principe d’ouverture et de réutilisation libre et gratuite des données va être atténué par les exigences du droit de propriété intellectuelle, le droit des données personnelles et dans certains cas, le droit de propriété sur les supports numériques

2. Le panorama européen[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation des collections patrimoniale est un important élément de la stratégie numérique pour l’Europe. Un certain nombre d'initiatives et recommandations11 appellent à une action concertée des Etats membres pour numériser leur patrimoine culturel à des fins de préservation, de recherche et de diffusion, mais aussi en vue de leur exploitation économique à travers des partenariats dans le domaine de l’éducation, du tourisme et des industries créatives.

En 2008 a eu lieu le lancement de la base Europeana, conçue en tant que bibliothèque numérique permettant d’accéder aux collections des institutions culturelles de l’ensemble des États membres. Actuellement, Europeana offre l’accès à 58 millions d’objets numériques provenant de plus de 3500 institutions à travers l’Union Européenne12.

À l’échelle de l’Union, le mouvement d’open data, initié en 200313 a fait l’objet de plusieurs évolutions dont la dernière en date est la directive du 20 juin 201914. Les données des musées, des bibliothèques et des archives sont inclus dans le champ de cette législation depuis 2013. La mise à disposition des données est encouragée sous format ouvert, aussi bien à des fins non-commerciales, que commerciales, sous réserve du respect des droits de propriété intellectuelle et le droit des données personnelles.

3. Le cadre international[modifier | modifier le wikicode]

Il n’existe pas de cadre international contraignant concernant la numérisation du patrimoine. Celle-ci est cependant fortement encouragée à des fins de l’étude et de la protection préventive du patrimoine en péril.

La déclaration « Reproduction of Art and Cultural héritage » (ReACH)15 adoptée le 8 décembre 2017 au Victoria et Albert Museum est signée sous l’égide de l’Unesco par plusieurs musées mondiaux dont le musée du Louvre et l’Ermitage. Elle fait l’écho à la « Convention pour la promotion universelle des reproductions d’œuvres d’art » d’Henry Cole de 1867 qui, dès cette époque, avait perçu les bénéfices des reproductions des œuvres d’art à des fins de conservation.

La déclaration incite la numérisation des collections, des monuments et des sites archéologiques dans un objectif de documentation, d’archivage et de préservation (Article 1 ReACH). Cette numérisation est très précieuse pour l’étude et la documentation du patrimoine en péril en raison des conflits armées, les conditions climatiques, le tourisme de masse, etc. La numérisation est également un moyen de transmission d’un patrimoine inaccessible, dégradé, disparu ou bien trop fragile pour être exposé ou mis à disposition aux chercheurs. La déclaration encourage la mise à disposition gratuite des archives à disposition du public à des fins d’utilisation personnelle, de recherche non-commerciale et d’un usage éducatif, scientifique et intellectuel (Article 10 ReACH).

De manière générale, la réglementation relative à la numérisation et à l’ « open data », qu’elle soit nationale, européenne ou internationale souligne l’importance du respect du droit d’auteur sur les œuvres numérisées. Cela montre par ailleurs la nécessité d’une certaine uniformisation de la législation en matière de propriété intellectuelle et l’importance de la mise en place de mécanismes facilitant l’accès aux contenus protégés, tout en respectant les prérogatives des ayant droits.

I. Les droits de propriété sur les objets numérisés[modifier | modifier le wikicode]

[A compléter ]

A. Le droit d'auteur sur les œuvres numérisées[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation d’une œuvre s’apparente à un acte de reproduction au sens du droit de la propriété intellectuelle (A). Cette propriété incorporelle, distincte de la propriété corporelle sur le support de l'œuvre n’appartient pas toujours aux institutions patrimoniales qui doivent donc solliciter l'autorisation des ayants droit (B). Cette contrainte est atténuée par un certain nombre d’exceptions légales (C).

1. La numérisation en tant que reproduction soumise au droit d’auteur[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation est avant tout une reproduction d’une œuvre préexistante. Elle permet de capter une image pour la conserver, démultiplier, communiquer. Cette image, tout en se détachant de l’original matériellement, en constitue une émanation qui lui reste juridiquement associée. Ainsi, sous certaines conditions, elle peut être l’objet de propriété incorporelle qu’est le droit d’auteur. Celui-ci protège les œuvres de forme originale16 qui est perceptible à travers les choix créatifs de l’auteur qui constituent l’empreinte de sa personnalité. La liste17 des objets protégés est large et non- limitative et ne s'applique pas uniquement aux beaux-arts. Sont concernées aussi bien les œuvres de forme matérielle qu'immatérielle, y compris celles qui sont périssables, éphémères ou inachevées. Ainsi, la protection concerne un très large spectre d'œuvres et donc un très grand nombre d'institutions patrimoniales.

Le droit d'auteur donne deux sortes de prérogatives au créateur de l'œuvre: les droits patrimoniaux et les droits moraux. Celles-ci sont toutes les deux concernées par la pratique de la numérisation.

1.1 La numérisation : une pratique relevant des droits patrimoniaux de l'auteur[modifier | modifier le wikicode]

Les droits patrimoniaux de l'auteur lui assurent un monopole économique sur son œuvre qui est limité à 70 ans après sa mort (article L.123-1 du CPI). Ils sont constitués par le droit de reproduction qui consiste en la fixation matérielle de l'œuvre par un procédé quelconque (article L.122-3 CPI) et le droit de représentation qui consiste dans la communication de l'œuvre au public (article L.122-2 CPI et s.).

La reproduction s’apprécie au sens large. Il s'agit de toute fixation de l'œuvre, indépendamment du support et de la technologie utilisée. La reproduction concerne aussi bien les objets matériels qu'immatériels, tels qu'une captation audiovisuelle d'une danse, un chant, un spectacle, etc.

La numérisation constitue indéniablement une reproduction au sens de la loi et nécessite une autorisation de l'auteur ou de ses ayants droit. Cette autorisation est spécifique et s'interprète de manière restrictive. Ainsi, l'auteur peut envisager de séparer les prérogatives liées à son droit de reproduction, par exemple en cédant ses droits de numérisation à des fins d'archivage et de conservation à une institution et ses droits de reproduction à des fins commerciales à un autre titulaire. Dans les faits, cela suppose une vigilance accrue lors de la rédaction des contrats de cession des droits18. Les clauses doivent être suffisamment détaillées et précises concernant les différents types de reproductions et leurs usages (L.131-3 CPI). Une cession incomplète ou trop générale peut nécessiter une renégociation ultérieure des droits et à défaut être à l'origine d'un conflit, voire d'un contentieux.

La numérisation est également un vecteur de la communication de l’œuvre, qui est l’autre volet du monopole économique de l’auteur et nécessite donc son autorisation. On considère qu'il y a une communication de l'œuvre, dès que celle-ci est mise à disposition à un public plus ou moins large quel que soit le médium choisi (une projection, une exposition, une mise à disposition dans les archives du musée ou travers le site Internet). De manière similaire au droit de reproduction, les institutions patrimoniales doivent négocier une cession suffisamment large permettant à l'institution d'accomplir à la fois ses missions de recherche et de communication du patrimoine.

1.2 La numérisation : une possible atteinte au droit moral de l'auteur[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation est certes avant tout associée à prérogatives patrimoniales de l'auteur. Nous avons donc tendance à associer les contraintes du droit d’auteur uniquement aux œuvres qui ne sont pas encore tombées dans le domaine public. Cependant, même au-delà des limites temporelles du monopole économique, la numérisation peut également porter atteinte au droit moral de l'auteur qui est perpétuel, inaliénable et imprescriptible (article L.121-1 du CPI).

Le droit moral, est la traduction d'une vision personnaliste du droit d'auteur français.19 Celui-ci est constitué notamment par le droit de la paternité, le droit au respect de l'intégrité de l'œuvre, le droit de divulgation et le droit de repentir (Articles L.121-1 à L.121-4 du CPI) 20.

Tout d'abord, c’est le droit de l'auteur d'associer son nom à son œuvre – le droit de paternité, qui est concerné par la numérisation et son exploitation. L’absence d'attribution ou une mauvaise attribution d'une œuvre constitue une violation du droit moral de l'auteur. Cela montre l'importance de l'exactitude des métadonnées accompagnant les reproductions et la responsabilité, non seulement scientifique, mais également juridique des institutions sur ce point.

Ensuite, une numérisation partielle, tronquée ou de mauvaise qualité21 peut être perçue comme dégradante et donc contraire au droit au respect de l'œuvre. Il est de même en cas de recadrage ou autre transformation de l'image22. Cela signifie-t-il que toute modification d’une reproduction d’œuvre est contraire au droit moral de l’auteur? Une réponse affirmative, pourrait rendre toute réalisation d’une œuvre multimédia23 ou autre produit dérivé problématique. En pratique, cela n’est pas le cas. Même si le droit moral est inaliénable, rien n'empêche l'auteur de valider à posteriori une modification de son œuvre qui est susceptible d'y porter atteinte. Ainsi, en cas de modifications significatives et en présence d'ayants droits susceptibles d'exercer les droits moraux, il peut être utile de valider le projet entrepris. Par ailleurs, les modifications peuvent être tolérées quand elles sont justifiées par des contraintes techniques ou rendues nécessaires par le passage d’un genre à un autre24. Enfin, le droit moral est mis en balance avec la liberté de création, auquel il ne doit pas apporter une contrainte excessive25 .

Au-delà du droit d'auteur, les œuvres peuvent également être objet d'autres droits de propriété intellectuelle : le droit des marques, le droit des brevets, les dessins et modèles, mais aussi des droits voisins. C'est par exemple le cas des droits des artistes interprètes (chanteurs, acteurs, musiciens, etc.) dans les œuvres audiovisuelles ou sonores. La numérisation et son exploitation, doivent donc en tenir compte le cas échéant.

2. A la recherche des titulaires des droits[modifier | modifier le wikicode]

Après avoir identifié le caractère protégeable d'une œuvre, les institutions patrimoniales peuvent être confrontées à la difficulté d'identifier les titulaires des droits de propriété intellectuelle. Cela n'est pas aisé, puisque les droits n'appartiennent nécessairement ni au propriétaire de l'œuvre, ni à l'auteur en raison des cessions successives (1). Un certain nombre de mécanismes tels que la gestion collective ou bien le statut spécifique des œuvres orphelines ou les œuvres hors commerce permettent de faciliter la tâche des institutions patrimoniales (2).

2.1 La distinction entre propriétaire du support corporel et titulaire des droits de propriété intellectuelle[modifier | modifier le wikicode]

Le droit d’auteur a un caractère incorporel et doit être distinguée du support matériel de l'œuvre (L.111-3 CPI). Ainsi le propriétaire - un musée, un collectionneur, n’est pas titulaire des droits de propriété intellectuelle, sauf cession expresse de la part de l'auteur. Cette double propriété sur le même objet peut être à la fois source de confusion pour les tiers et de conflit entre les deux propriétaires, notamment relativement à l’exposition ou la reproduction de l’œuvre. Ainsi, le droit de numériser et à fortiori à mettre à disposition cette numérisation peut ne pas appartenir à la structure qui peut sembler le mieux placée pour le faire en tant que propriétaire.

La jurisprudence nous fournit quelques illustrations de ces problématiques de distinction de propriété corporelle et incorporelle dans un cadre muséal. Ainsi par exemple, la reproduction d'une fresque murale par une agence de publicité, pourtant réalisée avec l'autorisation du musée propriétaire de l'œuvre, a été jugée contrefaisante faute d’autorisation par les titulaires des droits d'auteur26. Également, une société d'édition a été condamnée en contrefaçon pour avoir reproduit une image d'une création de mode, sans autorisation des ayants droits, malgré l'aval du musée propriétaire27. Ainsi, il est généralement préférable de conclure un contrat de cession de droits d'auteur lors de l'acquisition d'une œuvre pour éviter des blocages ultérieurs.

2.2 Des mécanismes facilitant l’exploitation des droits de propriété intellectuelle (à revoir/ synthétiser cette partie)[modifier | modifier le wikicode]

Une institution patrimoniale qui souhaite s’engager dans une politique de numérisation est généralement confrontée à un nombre très important d’auteurs du fait de l’ampleur de ses collections. Les titulaires des droits peuvent par ailleurs être inconnus ou difficilement identifiables. Un certain nombre de mécanismes ont été mis en place afin de faciliter l’exploitation des droits.

2.2.1 La gestion collective[modifier | modifier le wikicode]

Une partie des droits de propriété littéraire et artistique fait l’objet de gestion collective par des sociétés qui sont chargées à la fois de l’autorisation, la perception des redevances et la protection des droits au nom et pour le compte des auteurs. La gestion collective est une modalité précieuse afin d'obtenir, auprès d'un guichet unique, une autorisation pour exploiter des œuvres par exemple dans le cadre d’une exposition, un site Internet, un catalogue. En ce qui concerne les œuvres graphique et plastiques, les droits sont gérés généralement par l'ADaGP. Le calcul des redevances se fait suivant un barème28 qui tient compte notamment du type d’exploitation envisagée, de sa durée, son support et son caractère commercial.

Cependant, la gestion collective est loin d’être une solution miracle. Premièrement, elle n'est, sauf pour certaines prérogatives spécifiques, pas obligatoire et donc la totalité des auteurs ne sont pas affiliés à une société d'auteurs29. Dans ces hypothèses il faut donc procéder à une négociation au cas par cas ce qui peut être problématique dans le cas d’une volonté de mise en ligne de fonds très importants.

Ensuite, la gestion collective est en principe peu favorable aux licences libres30, et elle peut être paradoxalement un frein pour la négociation de conditions plus avantageuses avec un auteur. En effet, la gestion collective en France a une nature exclusive ce qui empêche les auteurs de négocier indépendamment leurs droits au cas par cas. Ainsi, un auteur qui a fait le choix de ce type de gestion, ne peut en principe pas autoriser ponctuellement une mise en ligne sous licence libres.

[A développer]

2.2.2 Le statut des œuvres orphelines[modifier | modifier le wikicode]

[A développer]

2.2.3 Une distribution facilitée des œuvres hors commerce[modifier | modifier le wikicode]

[A développer]

3. Des exceptions au droit d’auteur en faveur de la numérisation[modifier | modifier le wikicode]

[A développer]


B. Le droit à l'image des objets numérisés[modifier | modifier le wikicode]

Est-ce que le propriétaire d'un bien, serait également le propriétaire de son image et donc de sa reproduction numérique ? Il s'agit d'une question importante, aussi bien pour les institutions patrimoniales, que pour les collectionneurs privés qui souhaitent contrôler et fructifier les images de leurs collections. Cet éventuel droit à « l'image des biens » est à distinguer du droit de propriété intellectuelle puisqu'il est n'est pas attaché à la création, mais à la propriété du support corporel. Il est par ailleurs d'application plus large que le droit d'auteur, puisqu'il concerne à la fois les œuvres protégeables, celles dans le domaine public, ainsi que les objets non-susceptibles de protection : collections ethnographiques ou archéologiques, spécimens des musées d'histoire naturelle, etc.

Concernant le patrimoine culturel, ce débat s'inscrit dans un mouvement de prise de conscience croissante de la valeur des actifs immatériels de l’État42. La valorisation du patrimoine est fréquemment associée à l'exploitation de son image. La problématique qui se pose en pratique est celle de savoir qui a le droit de capter l'image et sous quelles conditions.

Le droit s'est saisi du sujet à travers plusieurs affaires plus ou moins récentes qui concernent aussi bien le patrimoine immobilier (1) que le patrimoine mobilier (2).

1. L'image du patrimoine culturel immobilier[modifier | modifier le wikicode]

Pour illustrer une campagne publicitaire de la bière « 1664 », la société Kronenbourg a fait usage de l’image du Château de Chambord, sans solliciter d'autorisation, ce qui a suscité le mécontentement de l'établissement public. A cette occasion, le Conseil d'Etat43 énonce que ni la prise de vue, ni l’utilisation à des fins commerciales de l’image d’un bien appartenant au domaine public ne constitue en elle-même un usage privatif de l’espace public et qu'une autorisation préalable n'est donc pas nécessaire. Le Conseil d’État aligne ainsi sa jurisprudence sur celle des juridictions civiles44 pour affirmer qu'il n'existe pas de droit à l'image des biens. Le propriétaire n'est cependant pas complètement dénué de recours, notamment quand l'utilisation de l'image lui cause un trouble anormal45 qui peut résulter des circonstances de la prise de vue ou des conséquences de l’exploitation de l'images (une atteinte de la vie privée, parasitisme, concurrence déloyale, etc.)46.

Tout en niant l'existence d'un droit à l'image des biens, l'affaire « Kronenbourg - Chambord » était une nouvelle occasion pour soulever le débat sur l'exploitation de l'image du patrimoine culturel public. Cela a aboutit à la mise en place, par la loi du 7 juillet 201647, d'un régime spécifique pour la captation et l'utilisation de l'image des « domaines nationaux » définis en tant qu'ensembles immobiliers qui ont un « lien exceptionnel avec l’Histoire de la Nation »48. Le nouveaux article L.621-42 du Code du patrimoine (CP) a instauré un régime d’autorisation, assortie d'une éventuelle redevance pour les utilisations à des fins commerciales. Cette autorisation n'est cependant pas requise « lorsque l'image est utilisée dans le cadre de l'exercice de missions de service public ou à des fins culturelles, artistiques, pédagogiques, d'enseignement, de recherche, d'information et d'illustration de l'actualité» indépendamment du caractère commercial de celles-ci49. Cela exclut un très grand nombre d’activités du champ d’application de l’autorisation, dont notamment l’édition (beaux livres, manuels) et les œuvres audiovisuelles (les documentaires, le cinéma). Les seules activités qui semblent concernées sont donc l’utilisation de l’image des domaines nationaux dans le cadre de la publicité, à titre de signe commercial (marque, enseigne etc.) et pour la production de produits dérivés50.

Le régime d'exception concernant l'image des domaines nationaux reste actuellement limité à certains ensembles immobiliers, mais il va certainement avoir tendance à s'élargir à l'avenir51. Ce dispositif n'a pas fait l'unanimité et il a été à l'origine d’une question prioritaire de constitutionnalité à l’initiative des associations Wikimedia France et la Quadrature du Net au motif qu'il s'oppose aux principes de la liberté d'entreprendre et la liberté de création. Le recours a été rejeté et la conformité à la Constitution de l'article L.621-42 CP a été reconnue par le Conseil Constitutionnel52 en vertu de l’intérêt général et la nécessité de protéger et de valoriser l’image des domaines nationaux.

Le régime de l'image des domaines nationaux s'inscrit clairement dans la tendance de valorisation économique du patrimoine immatériel de l’Etat et répond au besoin légitime des institutions culturelles de constituer des fonds propres à travers l'exploitation de leurs actifs immatériels. Cela va de pair avec une politique générale qui incite les institutions culturelles à l'autofinancement. Cependant, la multiplication de droits de sources différentes qui s'appliquent sur « l'image » d'un bien rétrécit de plus en plus le champs du domaine public libre de droits et nuit à l'équilibre initialement instauré par le droit d'auteur entre propriété et liberté.

2. L'image du patrimoine mobilier : une numérisation subordonnée à l' « accès » à l’œuvre[modifier | modifier le wikicode]

De même que pour les immeubles, il n'existe pas de droit à l'image des biens meubles53 qu'ils soit privés ou publics, indépendamment de leur statut ou leur valeur patrimoniale. Est-ce que cela signifie que tout le monde a le droit de capter l'image des œuvres muséales ? L'expérience d'un étudiant souhaitant prendre des photos d’œuvres de Vermeer54 au Louvre et les panneaux prohibitifs dans plusieurs institutions culturelles laissent penser que ce n'est pas le cas. Il est légitime de se demander quel est le fondement juridique de ces interdictions, notamment pour les œuvres tombées dans le domaine public, et en absence de droit à l'image appartenant au propriétaire55.

La maîtrise sur l'image se fait ici indirectement, à travers la réglementation de l'accès à l’œuvre. Cette réglementation que le visiteur accepte, pas toujours consciemment, dès qu'il entre dans les locaux de l'institution propriétaire. Ainsi, le peintre Bernard Buffet a été condamné pour avoir vendu un tableau représentant un château, en ne respectant pas les conditions imposées par le billet d’entrée par lesquelles le propriétaire se réservait l’autorisation pour toute utilisation pécuniaire de l’image du bâtiment56. Cet arrêt certes anecdotique montre que le pouvoir du propriétaire peut s'exercer à des niveaux différents afin de « monopoliser » l'image d'un bien et contrôler sa reproduction surtout quand celui-ci n'est pas visible depuis la voie publique. Par ailleurs, l’interdiction de prise de vue est également intégrée dans certains contrats de prêts d’œuvres, ce qui explique le traitement différencié des objets dans les expositions temporaires.

En plus des dispositions contractuelles, il existe une réglementation d'origine administrative qui subordonne certaines formes d'utilisation du patrimoine, et notamment les prises de vues, à autorisation et rémunération. Il en est également ainsi lorsque la prise de vue constitue une utilisation privative du domaine public au sens de l’article L.2122-1 du code de la propriété des personnes publiques (CPPP)57. C'est par exemple le cas lorsqu'elle suppose l’intervention du personnel du musée pour la manipulation des œuvres et la surveillance ou quand elle nécessite la privatisation d'une salle ou l'installation de matériel encombrant.

Si la tendance actuelle est d'assouplir les conditions, et même d'inciter les photographies des visiteurs58 il demeure l'enjeu des prises de vues professionnelles à usage notamment commercial59. Nous pouvons évoquer en la matière, l'affaire « Josse / Commune de Tours »60 qui a occupé les tribunaux pendant près de 10 ans. La société Photo Josse a demandé une autorisation de prendre des clichés de certains œuvres appartenant aux collections du musée des Beaux-Arts de Tours en vue de la publication des photographies dans des ouvrages scolaires, des livres d'art et dans la presse. Le Conseil d’État s’est fondé sur la future exploitation commerciale des œuvres pour juger que la prise de vue constitue une utilisation privative du domaine public61 et justifier le refus de l’autorisation. L'objectif de ces décisions est de « conserver un contrôle sur les conditions dans lesquelles sont établies et diffusées des reproductions photographiques des œuvres »62. Le musée acquiert ainsi un monopole de fait sur l'image des œuvres de ses collections. Il peut habiliter les photographes de son choix et déterminer les règles de réutilisation des clichés.

[A compléter]

II. Les droits de propriété sur l'objet numérique[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation donne naissance à un objet indépendant qui a une existence propre. Il convient de voir si cet objet peut à son tour être le support de droits, aussi bien corporels, qu'incorporels. Ainsi, cet objet numérique, peut être protégeable en soi par un droit d'auteur, sous certaines conditions (A). Au-delà de la propriété intellectuelle, il se pose également la question d'un éventuel droit sur l'image de l'objet reproduit qui va du coup imprègne son double numérique (B). Enfin, il faudrait envisager la numérisation dans sa matérialité, pour voir quel est le statut et donc les droits corporels sur le support numérique (C).

A. Le droit d'auteur sur l'objet numérique[modifier | modifier le wikicode]

Dans sa fonction d'archivage et de conservation, la numérisation constitue une reproduction fidèle d'une œuvre. Elle n'est donc en principe pas protégeable par un droit de propriété intellectuelle, puisqu'elle ne correspond en principe pas aux critères de protection : la forme originale. Ainsi, on peut difficilement envisager de conférer un droit d'auteur à la personne qui scanne un ouvrage. Cependant, la situation est plus complexe lorsque la numérisation se fait par l'intermédiaire d'une photographie, ce qui est souvent le cas dans le domaine patrimonial. L'empreinte de la personnalité du photographe, condition de la protection, s'apprécie au cas par cas (1). Ensuite, la numérisation, peut être envisagée dans sa dimension d'étape intermédiaire à la création d'une autre œuvre. Au fil des modifications et adaptations, l'œuvre dérivée peut être l'objet à son tour de droits de propriété intellectuelle (2).

1. La protection des photographies d'œuvres d'art31[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Les critères de la protection : l'empreinte de la personnalité du photographe[modifier | modifier le wikicode]

Le Code de la propriété intellectuelle vise expressément les photographies parmi les œuvres protégeables par un droit d'auteur (article L 112-2 CPI). Le seul critère est celui de la forme originale. Le mérite, le caractère professionnel du photographe ou l'aspect artistique de la photo sont indifférents. En occurrence, la personnalité de l'auteur s'exprime à plusieurs niveaux32. Il peut s'agir aussi bien de la mise en scène des éléments à photographier (composition, lumière), le cadrage et le point de vue, mais aussi à travers la retouche (modification de couleur, création d'effets, etc.).

En ce qui concerne les photographies d'œuvres d'art, l'objectif même de la prise de vue est en principe la reproduction la plus fidèle possible de l'œuvre. Il est donc légitime de se demander si le photographe a la latitude d'exprimer sa personnalité à travers des choix créatifs, ou bien si son geste est contraint par des exigences techniques et relève davantage d'un savoir- faire que de la création.

Il paraît à priori difficile de retenir le caractère protégeable d'une grande partie des photographies d'œuvres, surtout quand elles sont bidimensionnelles  (par ex : des tableaux, des dessins, des manuscrits)33. Le photographe, déploie certes un important savoir-faire34, mais celui-ci est au service d'une restitution conforme à l'original35. En principe, les critères de protection ne devraient donc pas être réunis36. Tout de même, dans certains cas, les tribunaux ont accordé des droits au photographe. C'est notamment le cas lorsque celui-ci a effectué un « choix délibéré des éclairages, de l’objectif, des filtres, et du cadrage ou de l’angle de vue », et a aussi procédé à des « agrandissements mettant en exergue un fragment de l'œuvre »37.

En ce qui concerne les œuvres tridimensionnelles, l'artiste a généralement beaucoup plus de marge de manœuvre et il serait plus facile de prouver l'originalité de la photographie. Il peut ainsi choisir une lumière, un point de vue particulier, une mise au point spécifique pour faire ressortir certains éléments davantage que d'autres38.

Donc, il s'ensuit qu'une analyse de cas par cas est nécessaire afin d'étudier l'originalité des photographies d'œuvres d'art. Celle-ci ne peut en aucun cas être systématique, ni présumée et doit être prouvée. Ainsi, elle serait très difficilement retenue dans les photographies banales, avec des points de vues standards qui sont par exemple destinées aux photothèques et bases de donnes des musées39.

1.2 Les conséquences de la protection : un regrettable emboîtement de droits[modifier | modifier le wikicode]

La protection des photographies des œuvres d'art par un droit d'auteur va engendrer toutes les conséquences décrites ci-dessus en matière de droits patrimoniaux et droits moraux des auteurs.

Cela n'est pas anodin, tout d'abord pour les institutions patrimoniales. Dans le cas de photographies protégeables, celles-ci doivent payer des droits aussi bien pour la prestation fournie, que pour les droits de propriété intellectuelle sur les photos. Elles se trouvent également parfois dans l'impossibilité d'utiliser ou communiquer librement les œuvres de leurs propres collections. Une éventuelle politique d'open access sous licences libres peut se trouver ainsi subordonnée à des autorisations et négociations, non seulement avec les ayants droits des œuvres numérisées, mais également avec les titulaires des droits sur les numérisations elles-mêmes.

Ensuite, cela impacte les tiers, notamment éditeurs, chercheurs et usagers. Le manque de transparence sur la protégeabilité des photographies d’œuvres d'art et la jurisprudence fluctuante sur la question dissuade l'utilisation de certaines images d’œuvres qui sont pourtant tombées dans le domaine public40. Ces regrettables pratiques brisent l'équilibre instauré par le caractère temporaire des droits qui concilie les droits de l'auteur d'un côté et le celui de la société d'un autre41. Cela va également à l'encontre de la politique d'open access dans le domaine patrimonial. Une solution pratique, favorisant la sécurité juridique serait de soumettre les photos d’œuvres à des licences libres, du moins en ce qui concerne les collections publiques des musées. Cela éviteras aux usagers de devoir faire la part entre photos protégeables et non protégeables, ce qui peut être une tâche difficile même pour un juriste spécialisé dans le domaine.

Les arguments en faveur des photographies d’œuvres sont en principe d'ordre financier. Il s'agit indéniablement d'une pratique qui demande à la fois un très important savoir-faire et un investissement humain et financier. Tout de même, le droit d'auteur ne semble pas le moyen de protection le mieux adapté pour une grande partie des photographies d’œuvres, dont l'originalité est très peu marquée voir inexistante. Il convient de rappeler que celui-ci protège la création et non pas l'effort financier, le travail ou la maîtrise technique. L'instrumentalisation de la propriété intellectuelle même pour une cause juste semble regrettable.

2. La protection des objets numériques dérivés[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation a transformé en profondeur les enjeux de la reproduction des œuvres. Elle permet non seulement une reproduction plus rapide, la communication instantanée et d'une ampleur inédite, mais également favorise la réutilisation et la transformation des œuvres numérisées pour en créer des œuvres dérivées. Le format binaire est notamment particulièrement malléable et a favorisé l'émergence à la fois de nouveaux produits de médiation et de merchandising, mais aussi a été au service de la créativité des visiteurs et internautes.

Si elles correspondent aux critères de protection, ces œuvres dites composites sont protégeables par un droit d'auteur indépendamment de l'œuvre originale. Ainsi par exemple, une œuvre multimédia commandée par un musée et crée à partir des numérisations fournis par celui-ci donne lieu à la fois à un paiement pour le produit réalisé, mais également à des redevances au titre du droit d'auteur. Des modalités de la licence accordée va dépendre à la fois l'exploitation et le devenir de ce nouvel objet numérique.

Cependant, les œuvres composites restent tout de même dépendantes de l’œuvre initiale et aussi bien leur création que leur exploitation nécessitent l'autorisation de son auteur. A défaut, ils peuvent porter atteinte aussi bien aux droits moraux qu'aux droits patrimoniaux de l'auteur comme évoqué ci-dessus.


B. La propriété corporelle sur l'objet numérique[modifier | modifier le wikicode]

Au-delà de la propriété immatérielle qui s'applique sur l'image, la numérisation peut être aussi envisagée en tant que support matériel : un fichier, une photo, un flux de données. Ce support matériel pose des questions de conservation, d'obsolescence technologique, de qualité, mais également de propriété. Le propriétaire d’un objet numérique peut conditionner aussi bien l’accès que la réutilisation de celui-ci. Il convient d'étudier ici la propriété corporelle et les enjeux qu'elle peut avoir sur l'exploitation des objets numériques.  

1.     L’accès à l’œuvre subordonné à la propriété corporelle sur le support numérique[modifier | modifier le wikicode]

Largement sous-estimé par rapport aux enjeux du droit d'auteur, la propriété du support physique ou technologique d'une numérisation est tout aussi importante pour assurer un accès effectif à la culture. Le propriétaire de la copie numérique peut décider de son accessibilité et conditionner sa réutilisation. Lorsque cette propriété est accompagnée d'une exclusivité de prise de vue, le propriétaire du support numérique a de facto un monopole sur l'image. Ainsi, le droit d’utilisation de l’image d’une œuvre, pourtant légalement reconnu, peut être réduit à peau de chagrin en cas d’absence d’accès à une copie numérique d’une qualité satisfaisante. L’appropriation d’une image à travers sa numérisation, couplée à une exclusivité de prise de vue peut avoir des effets bien plus restrictifs sur son accès et sa réutilisation que le droit de propriété intellectuelle. En effet, le droit de propriété sur le support ne souffre pas d’exceptions[1], à la différence de la propriété intellectuelle. Ainsi, malgré l’exception d’enseignement et de recherche, ou même en cas d’œuvres tombées dans le domaine public, les chercheurs sont parfois amenés à payer pour obtenir une numérisation de bonne qualité à intégrer dans leurs travaux[2].

La Commission Européenne est sensible aux problématiques liées aux supports numériques qui peuvent empêcher l’accès au patrimoine. Ainsi, dans le cadre de la « Recommandation sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique »[3] elle insiste sur le fait qu’il « conviendrait d’éviter, pour les exemplaires d’œuvres du domaine public, de recourir à des filigranes ou d’autres mesures de protections visuelles envahissantes comme indication de propriété ou de provenance » afin que ce contenu puisse être largement consulté et réutilisé.

Dans une autre approche de la même finalité, le législateur français est conscient de l’importance du « contenant » mis à disposition pour assurer l’accès et la réutilisation des données dans le cadre de la politique d’open access. Ainsi, il a imposé que les formats mis à disposition par voie électronique se fassent « dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé »[4].

De manière générale, la mise à disposition d’un support approprié est indispensable pour assurer un accès effectif au patrimoine. La maîtrise de la propriété du support numérique représente donc un véritable enjeu pour les institutions culturelles.

2.    L’importance de la maîtrise contractuelle de la propriété sur le support numérique[modifier | modifier le wikicode]

La numérisation peut être effectuée en interne par une institution, mais peut également être le fruit d’un partenariat avec d’autres acteurs publics ou privés. C’est le cas lorsque l’institution fait appel à un prestataire, mais aussi lors de projets complexes qui nécessitent à la fois du matériel spécialisé et la maîtrise d’un important savoir-faire, comme par exemple concernant la numérisation et la modélisation 3D d’objets ou de sites archéologiques[5].

Les partenariats public-privé sont également encouragés afin de soutenir l’effort financier de la numérisation du patrimoine[6]. Ainsi, pour amortir le coût de la numérisation, la loi[7] prévoit la possibilité d’accorder un droit d’exclusivité concernant les besoins de la numérisation des ressources culturelles qui peut être supérieur à dix ans, sans dépasser 15 ans[8]. La législation européenne en matière d’open access appelle à la vigilance relativement aux contrats avec des entreprises privés. Ainsi, les institutions doivent veiller à ce que ces partenariats soient équilibrés[9], et qu’ils n’entraînent pas un accès privilégié au matériel numérique pendant une durée excessive. Il est d’ailleurs préconisé que les fichiers physiques d'œuvres du domaine public, numérisées dans le cadre de partenariats, restent la propriété de l'institution publique partenaire[10].

Le risque d’un contrat trop restrictif serait d’aboutir à une privatisation du domaine public, avec pour conséquence une limitation de l’accès et de la réutilisation des images des œuvres. Un exemple de partenariat polémique concerne la numérisation de livres et de disques anciens de la Bibliothèque nationale de France. Les contrats conclus avec les sociétés ProQuest et Believe Digital ont suscité des inquiétudes concernant les restrictions à l’accès de documents et leur réutilisation par des chercheurs, du fait de l’exclusivité accordée aux entreprises privées[11].  Nous pouvons également citer l’exemple de la Chapelle Sixtine, dont les droits exclusifs sur l’image des fresques ont appartenu pendant plusieurs années à la chaîne de télévision japonaise Nippon Télévision, en échange du financement de sa restauration[12].  

3.    L’accès et la réutilisation des numérisations confrontés au droit des propriétaires d’une base de données[modifier | modifier le wikicode]

Au-delà de la propriété de la numérisation, se pose celle des données qu’elle est susceptible de fournir. Les images, notamment celles réalisées dans des objectifs scientifiques ou documentaires (modélisations 3D, radiographie, imagerie hyperspectrale, etc.), peuvent être des outils importants de l’étude, de la conservation et de la restauration du patrimoine. Ces données peuvent également être appropriées, notamment à travers leur inclusion dans une base de données. Il convient de s’assurer que les modalités d’accès et de réutilisation de ces dernières n’empêche pas le travail des chercheurs.

Le code de la propriété intellectuelle[13] consacre un droit sui generis au profit du producteur de bases de données qui est la personne qui prend l’initiative et le risque financier de la production de la base et qui peut attester d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel dans sa réalisation. Celui-ci permet aux producteurs d’interdire l’extraction et la mise à disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, mais aussi certaines extractions ou réutilisations répétées et systématiques de parties non substantielles de celle-ci. Ce droit se superpose aux éventuels droits de propriété intellectuelle sur les éléments constitutifs de la base. Les organismes culturels, aussi bien publics que privés peuvent bénéficier de cette protection. Le droit des producteurs de bases de données est donc une couche de propriété supplémentaire qui est susceptible de conditionner l’usage des numérisations et des données qui en découlent.

Le droit des producteurs de bases de données a fait l’objet d’aménagements par le législateur afin de ne pas entraver la politique d’open access. La loi pour une République Numérique[14] interdit aux personnes publiques d'invoquer ce droit pour faire obstacle à la réutilisation du contenu des bases qu'elles produisent dès lors que celles-ci sont soumises à une publication obligatoire. L’exception ne s’applique pas lorsque l’administration intervient dans l’exercice d’une mission de service public à caractère industriel et commercial soumis à la concurrence. Des éventuels droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers sont cependant préservés. L’intérêt principal de cette disposition est donc de permettre la réutilisation de bases de données avec un contenu non protégeable ou bien tombé dans le domaine public.

De manière générale, le droit du producteur de bases de données, qu’il soit public ou privé, ne peut interdire, sauf exceptions, l'extraction et la réutilisation d'une partie substantielle du contenu de la base à des fins exclusives d'illustration dans le cadre de l'enseignement et de la recherche. A cela s’est ajoutée[15] une exception de fouilles de textes et de données permettant aux chercheurs les copies ou reproductions numériques d’une base de données.

4.       Une réutilisation des œuvres conditionnée par le titulaire du support numérique[modifier | modifier le wikicode]

Les législations successives[16] sur l’ouverture des données ont élargi les possibilités de réutilisation des informations émanant du secteur public qui peuvent être exploités y compris à des fins commerciales. La loi pose le principe de gratuité de cette réutilisation avec certaines exceptions. Outre les limitations dues aux éventuels droits de propriété intellectuelle, étudiés ci-dessus, une redevance peut être exigée dans certains cas même en ce qui concerne des informations non protégées. C’est notamment le cas des institutions culturelles qui bénéficient d’un régime de faveur au titre de l’article L324-2 du CRPA. Ainsi, la réutilisation peut donner « lieu au versement d'une redevance lorsqu'elle porte sur des informations issues des opérations de numérisation des fonds et des collections des bibliothèques, y compris des bibliothèques universitaires, des musées et des archives ». Ce traitement différencié des institutions culturelles, qui vaut également pour l’évaluation de la redevance[17], est également présent au sein de la législation européenne. La redevance doit faire l’objet d’une licence[18] qui fixe les conditions de la réutilisation. Il peut également s’agir d’une licence à titre gratuit selon des modalités choisie dans une liste fixée par décret[19].

Ainsi, certaines institutions imposent des redevances pour la réutilisation des numérisations de leurs collections, pourtant tombées dans le domaine public[20]. Le plus souvent la redevance concerne la réutilisation commerciale. Cependant ce terme peut avoir une définition plus ou moins large. Il est ainsi susceptible de s’appliquer aux expositions, aux beaux livres et même aux publications scientifiques, actes de colloques ou sites Internet affichant de la publicité.  

Cette redevance a pour objectif d’amortir le coût de la numérisation des collections des institutions patrimoniales. Il est cependant regrettable qu’elle se développe au détriment de la politique de libre accès et de réutilisation des données culturelles avec par conséquence un impact négatif sur la popularisation des collections.

Enfin, en ce qui concerne l’échange des données entre les administrations publiques dans le cadre de l’accomplissement de leurs missions de service public, celui-ci ne peut plus faire l’objet d’une redevance[21] depuis le 1er janvier 2017. Cette disposition qui est également applicable aux établissements culturels peut favoriser l’exploitation de ces données dans le cadre de la recherche publique[22]. La portée exacte de ce droit reste cependant à déterminer et risque d’être limité à certains travaux de recherche uniquement.  

[Finir sur les autres législations qui sont susceptibles de conditionner l’accès au patrimoine numérisé]

Conclusion :[modifier | modifier le wikicode]

[A compléter]


[1] Il peut tout de même être susceptible d’abus, mais celui-ci sera plus difficilement caractérisé que les exceptions au droit d’auteur.

[2]Ajouter référence rapport de l'INHA

[3] Recommandation de la Commission du 27 octobre 2011 sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique (2011/711/UE), considérant 13.

[4]Article L. 300-4 CRPA

[5] G. Morel, « Les nouvelles technologies au service de la mémoire », In Connaissance des Arts, Hors-séries, HS n°741, l’Histoire commence en Mésopotamie, Sites éternels, De Bâmiyân à Palmyre, pp.44-49.

[6] Recommandations de la Commission du 27 octobre 2011 sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique (2011/711/UE) : considérant 9 ; recommendation 2. ; Annexe ; Voir également la Résolution du Parlement européen du 5 mai 2010 sur «Europeana – Prochaines étapes», n°45 et s. ; La directive (UE) 2019/1024 du Parlement Européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public - considérant 49 et s.

[7] Article L325-3 CRPA.

[8] Cette durée est supérieure aux préconisations  européene : elle est fixée à 7 ans par la Recommandation sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique, op.cit. La directive (UE) 2019/1024, op. cit. admet une possible exclusivité d’une durée ne dépassant pas 10 ans (considérant 49).

[9] Idem.

[10] Résolution du Parlement européen du 5 mai 2010 sur «Europeana – Prochaines étapes» (2009/2158(INI)), n°25

[11]Eric Chaverou, « Numérisation polémique à la BNF », France Culture, Disponible sur https://www.franceculture.fr/economie/numerisation-polemique-la-bnf , consulté le 18.01.2021

[12] « Nippon TV and Vatican », New York Times, 29 Mars 1990, Disponible sur https://www.nytimes.com/1990/03/29/arts/nippon-tv-and-vatican.html, consulté le 03.01.2021

[13] Articles L 341-1 à 343-7 CPI

[14] Article L. 321-3 CRPA

[15] LOI n°2016-1321 du 7 octobre 2016 - art. 38, Article L342-3 5° du CPI

[16] Il s’agit essentiellement de la loi LOI n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 et la Loi LOI n°2016-1321 du 7 octobre 2016, précités.

[17] Voir article 6 de la Directive Open Data de 2019, précitée. / article 6 de la Dir. 2013/37/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : la redevance peut inclure en plus des frais de collecte, de production, de reproduction, de diffusion, de conservation et d’acquisition des droits, un « retour sur investissement raisonable ».

[18] En ce qui concerne l’importance de la mise à jour des licences[18] suite à la loi Valtaire, voir notamment Calimaq, Une énorme faille dans la loi Valter sur les données culturelles?, Scinoflex, 13 décembre 2016, disponivle sur … consulté le ….

[19] D.323-2-1 CRPA : ces licences peuvent être plus ou moins permissives, avec une obligation de réciprocité ou non -  ex : Open database License, CeCILL, GNU General Public License, etc.  

[20] Voir notamment les conditions de réutilisation des images de Gallica : https://gallica.bnf.fr/edit/und/conditions-dutilisation-des-contenus-de-gallica, consulté le 28.01.2021 ;

[21] LOI n°2016-1321 du 7 octobre 2016 - art. 1

[22] Voir Marie Cornu, « Ouverture des données : les trompe-l’œil de la loi », op.cit. p.516




[1] Recommandations de la Commission du 27 octobre 2011 sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique (2011/711/UE) : considérant 9 ; recommendation 2. ; Annexe ; Voir également la  Résolution du Parlement européen du 5 mai 2010 sur «Europeana – Prochaines étapes», n°45 et s. ; La directive (UE) 2019/1024 du Parlement Européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public - considérant 49 et s.

[2] Idem.

[3] Cette durée est fixée à 7 ans par la Recommandation sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique, op.cit. La directive (UE) 2019/1024, op. cit. admet une possible exclusivité d’une durée ne dépassant pas 10 ans (considérant 49).

[4] Résolution du Parlement européen du 5 mai 2010 sur «Europeana – Prochaines étapes» (2009/2158(INI)), n°25

[5] Eric Chaverou, « Numérisation polémique à la BNF », France Culture, Disponible sur https://www.franceculture.fr/economie/numerisation-polemique-la-bnf , consulté le 18.01.2021

[6] « Nippon TV and Vatican », New York Times, 29 Mars 1990, Disponible sur https://www.nytimes.com/1990/03/29/arts/nippon-tv-and-vatican.html, consulté le 03.01.2020


[1] G. Morel, « Les nouvelles technologies au service de la mémoire », In Connaissance des Arts, Hors-séries, HS n°741, l’Histoire commence en Mésopotamie, Sites éternels, De Bâmiyân à Palmyre, pp.44-49.


[1]Ajouter référence rapport de l'INHA

[2] Recommandation de la Commission du 27 octobre 2011 sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique (2011/711/UE), considérant 13.

[3] CRPA, art. L. 300-4 nouveau (La loi pour une République numérique du 7 octobre 2016).

[A compléter]

1La numérisation est ici conçue dans un sens large : il s'agit de toute reproduction d'un objet sous format numérique indépendamment des modalités : un scan, une numérisation 3D, une photographie, etc.

2Gérard Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, presses universitaires de France, 8 éd., 2000, p. 686

3Pour une histoire de la numérisation en France voir : http://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Innovation-numerique/Numerisation2, consulté le 27.07.2020.

4« Préparer l’entrée de la France dans la société de l’inform@tion », programme d’action gouvernemental, Premier ministre, Service d’information du gouvernement, 1997 .

5Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal

6L'ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques.

7Notamment par la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public

8Loi pour une République Numérique n° 2016-1321 du 7 octobre 2016

9Cette obligation concerne les administrations d’État, les collectivités locales de plus de 3 500 habitants, les établissements publics et les organismes privés chargés d’un service public, à l’exception des entités de moins de 50 agents ou salariés.

10Voir notamment : C. Dommange, Ouverture et partage des données publiques culturelles, pour une (r)évolution numérique dans le secteur culturel, Rapport du Ministère de la Culture, n°2013-03 ; Numérisation et valorisation des contenus culturels : Guide ouverture et réutilisation des informations publiques numériques du secteur culturel publié par le ministère de la Culture (janvier 2017) ; Open data : un guide pratique dédié aux données publiques culturelles (juillet 2019).

11Voir notamment : Comm. (2005)465 final, 30 septembre 2005, Bibliothèques numériques ; Comm. CE, recomm. 2006/585/CE, 28 août 2006, sur la numérisation et l'accessibilité du matériel culturel et la conservation numérique; Résolution du Parlement européen 2011/C 81 E/04, du 5 mai 2010 « Europeana – Prochaines étapes » ; concl. du Conseil du 10 mai 2010, concl. du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, sur le plan de travail 2011-2014 pour la culture, 2010/C 325/01, 2 déc. 2010. ; Comm. CE, recomm. (2011/711/UE), 27 octobre 2011 sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique. ;

12Données pour le début de l’année 2020 : https://pro.europeana.eu/about-us/mission, consulté le 18.09.2020.

13Directive (UE) 2003/98 du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public, modifiée par la directive 2013/37 du 26 juin 2013.

14Directive (UE) 2019/1024 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public.

15Pour plus d’information sur la déclaration ReACH voir : B. Cormier, Copy culture, Sharing in the Age of digital Reproduction, V&A publishing, London 2018, p. 19 et s.

16Article L.111-1 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI)

17La liste non exhaustive des œuvres protégeables est détaillée à l'article L.112-2 du CPI : livres, œuvres dramatiques, chorégraphiques, photographiques, musicales, cinématographiques, de dessin, de peinture, d’architecture, les logiciels, les œuvres d’art appliqué, etc.

18 En ce qui concerne les mentions obligatoires et les spécificités des contrats en fonction de l'objectif de la numérisation (stockage, création, transmission) voir : Ch. Nguyen Duc Long, La numérisation des œuvres, aspects de droit d'auteur et de droits voisins, Publication de l'IRPI, éd. Litec, Paris, 2001, p.31 et s. et p. 53 et s.

19 En ce qui concerne l'importance du droit moral dans le droit d'auteur français : voir F. Pollaud-Dulian, Le droit d'auteur, 2eme édition, Economica, 2014, Paris, p.547 et s.

20 Nous allons nous focaliser, dans la présente présentation sur les prérogatives du droit moral qui sont susceptibles d'entre en confrontation avec la numérisation des œuvres.

21 TGI Paris, 2 novembre 1988, Cah. dr. Auteur, mars 1989, p.19 : Une reproduction de mauvaise qualité d'une photographie due au travail de photogravure et d'impression a été considérée comme dénaturante ; Paris 16 novembre 2012, CCE 2013, n°50, note Caron : une reproduction qui n’est pas fidèle à l’œuvre originale porte atteinte au respect du nom de l’artiste et à l’intégrité artistique de son œuvre.

22 TGI Paris 26 juin 1985, D. 1986, somm. 184, obs. Colombet : le fait de faire disparaître le décor entourant un personnage constitue une atteinte au droit moral ; idem pour l’adjonction de couleurs à un dessin publié en noir et blanc – Crim. 3 mars 1898, Ann. Prop. Ind. 1899. 72.

23 Voir Sirinelli, Industries culturelles et nouvelles techniques, rapport, p.97 – compléter la référence

24 F. Pollaud-Dulian, Le droit d’auteur, op.cit., p.630 et s. : sur la question du droit au respect confronté aux nécessités de l’adaptation.

25 Cass. Civ. 1re, 22 juin 2017 : « Dialogue des carmélites » : La Cour se prononce en faveur de la liberté du metteur en scène face aux ayants droits qui considéraient l’adaptation comme étant dénaturante. ; Cass. civ. 1re 3à janvier 2007, « Suite des Misérables », bull civ.I, n°47, D. 2007 : la Cour se prononce en faveur de la liberté de création de l’auteur d’une suite littéraire malgré le désaccord des ayants droits.

26 CA Paris 4e ch. A, 11 juin 1997, D. 1998 somm. 192, obs Colombet.

27 Cass civ. 1re 25 janvier 2005 AJ. 956, note Allaeys : La donation d’un manteau par un artiste à un musée, n’importe pas l’autorisation de la diffusion de son image.

28 Barème de l’ADaGP pour l’année 2020 : https://www.adagp.fr/sites/default/files/bareme_adagp.pdf

29 Par exemples les droits d’auteur de Picasso sont gérés par « l’Administration Picasso »

30 Les licences libres dans le secteur culturel, rapport de mission pour le CSPLA, Décembre 2017, p. 12. Il a tout de même des initiatives spécifiques en faveur des licences libres comme l’accord entre la SACEM et Creative Commons France.

31 Marie Cornu, …. ; A. Latreille, L'appropriation des photographies d'œuvres d'art : D. 2002, chron. p. 299 et s.

32Christophe Caron, Droit d'auteur et droits voisins, 5e ed., Lexis Nexis, Paris, 2017., n°156, p.137

33Cela est d'ailleurs une position de principe de Wikimedia qui considère que les photographies des œuvres d'art bidimentionelles ne sont pas protégéables par le droit d'auteur : https://commons.wikimedia.org/wiki/Template:PD-Art. Certains musées, comme la National Galery of Art, ont adopté une position similaire dans leur politique d'open access : https://www.nga.gov/notices/open-access-policy.html

34Cass. 1 civ. 11 mai 2017 CCE 2017, comm. 59, note Ch. Caron : la cour décide que le savoir-faire n'est pas protégeable par le droit d'auteur - décision à trouver absolument pour voir quel est le contexte.

35Dans ce sens : Christophe Caron, Droit d'auteur et droits voisins, 5e ed., Lexis Nexis, Paris, 2017., n°158, p.139

36 CA Aix en Provence 20 janvier 2004 CCE avril 2004 comm 37 Caron : protection refusée à des photographies de catalogue qui ne font que représenter des objets « qui sont la « reproduction fidèle des dits objets, sans aucune recherche particulière notamment dans la composition », le choix des prises de vues obéissant à des impértifs exclusivement techniques », « les éclairages et les angles retenus n’ayant pour but que de représenter nettement lesdits objets ». Dans le même sens : TGI Paris 7 janvier 2003, PI avril 2004, n°11 p.633, note Sirinelli. : Refusant l’originalité de photographies de tableaux destinées à un catalogue d’exposition ; CA Paris 24 juin 2005 Jurisdata n°279386, CEE septembre 2005, n°131, note Caron : décision considérant que la photographie n'était que la représentation fidèle d'un tableau.

37 CA Paris 26 septembre 2001, D. 2001 AJ 3279, JCP E 2002. 321, note Caron : à propos des photographies de tableaux dans un catalogue raisonné, la Cour a retenu le caractère protégeable des photos d'oeuvres d'art . Voir aussi dans le même sens : Dijon, 7 mai 1996 : Gaz. Pal. 1998. Somm. 514 ;  Paris, 4 mars 2009, RTD com 2009, 299, obs. Pollaud-Dulian – originalité est reconnue (décision à trouver) ; Com, 5 avril 2018, n°13-21.001 : en ce qui concerne l'originalité des photographies d'un catalogue de ventes aux enchères publiques. - décision à trouver pour voir si elle concerne des œuvres bidimensionnelles ou tridimensionnelles ; TGI Paris 7 mai 2010 : RIDA oct. 2010, p.383 note Sirinelli : Sur la protection de « tableau photo » ;

38 CA Paris 5 mai 2000 : décision retenant l'originalité d'une photographie de sculpture. ; CA Paris, 6 octobre 2004 CCE décembre 2004, comm. 157, obs. Ch. Caron : la photographie d'une monnaie est considérée comme étant originale.

39Marie Cornue, Droit, œuvres d'art et musées, p.485 (à confirmer)

40Voir ici en ce qui concerne le risque pour la recherche.

41En ce qui concerne la critique de la politique de la RMN sur ce point voir plus particulièrement : à compléter

42Voir notamment le rapport Lévy-Jouyet présenté au nom de la Commission sur l'économie de l'immatériel, nov. 2006 ; Ph. Terneyre, « Les actifs immatériels des personnes publiques », Revue juridique de l’économie publique n°714, Décembre 2013, étude 16 ;F. Tarlet, « L’image des biens publics », AJDA 2017, p.2069 et s.

43L'ensemble des décisions rendues dans l'affaire Kronenbourg-Chambord : TA Orléans, 6 mars 2013, n° 1102187 ; CAA Nantes, 16 déc. 2015, n° 12NT01190 ; CE 13 avril 2018, n°397047

44 La jurisprudence des juridictions civiles en matière de droit à l'image des biens est constatnte depuis l'arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de Cassation du 7 mai 2004, « Hôtel de Girancourt », Bull. A.P. , n°10 p.21 : Dans cette affaire la façade d’un immeuble historique de Rouen était reproduite sur un dépliant publicitaire d’une société de promotion immobilière. L'Assemblée pléniaire énonce que « le propriétaire d’une chose ne dispose pas de droit exclusif sur l’image de celle-ci ».

45Sur la notion de trouble anormal, voir F. Pollaud-Dulian, Droit à l’image des biens : trouble anormal causé au propriétaire, D. 2012, p. 2218 ; il peut ainsi s 'agir d'une atteinte à la vie privée.

46Pour un exemple de trouble anormal dans le cas d'un monument historique : CA Orléans, 10 novembre 2005 n° 04/02717, « Navire Belem » : L’image d’un navire, classé monument historique, a été utilisée par un tiers pour la production de produits dérivés. Le trouble anormal a été caractérisé par le parasitisme puisque le propriétaire du navire commercialisait également des produits reprenant l’image de son bien et du préjudice d'image en raison de la mauvaise qualité des reproductions.

47Loi n°2016- 925 du 7 juillet 2016 dite « Loi Création »

48Les domaines nationaux ont été listés par décrêt (n° 2017-720 du 2 mai 2017) : le domaine de Chambord, le château d’Angers, le Palais du Rhin à Strasbourg, le domaine de Pau, le domaine du Louvre et des Tuileries, et le Palais de l’Élysée.

49 Cette interprétation a été confirmée pat le Conseil Constitutionnel : Cons. const., 2 févr. 2018, n° 2017-687.

50Tout de même, cette distinction entre le purement commercial et l’artistique n’est pas toujours évidente. La jurisprudence à venir va apporter sans doute d’avantage de précisions sur l’interprétation à retenir .

51Le décrêt ne propose qu'une « première liste » de domaines nationaux.

52Cons. const., 2 févr. 2018, n° 2017-687 - J-D Dreyfus, Droit à l'image des domaines nationaux : constitutionnalité de l'amendement « Kronenbourg » Suites de l'affaire Chambord ou de la difficulté à ériger un véritable droit de l'image des biens publics, AJ Collectivités Territoriales 2018 p. 155. ; M. Cornu Droit culturel des biens - Le législateur culturel et les chantiers de la création, de l'architecture et du patrimoine, CCE n°3, mars 2017, étude 5, p. 8 et s.

53CA Orléans, ch. com., 15 févr. 2007, n° 06-00988 : En ce qui concerne l’image des biens meubles privés, dans une affaire concernant la photo d’une chienne qui avait figuré sur une carte postale sans autorisation de ses maîtres.

54 L'étudiant qui souhaitait prendre des photos d'oeuvres lors de l'exposition «  Vermeer et les maîtres de la peinture du genre », (22 février 2017 – 22 mai 2017 ) au mépris du réglement, s'est vu obligé de quitter les salles du musée. https://www.nouvelobs.com/rue89/20170310.OBS6400/guillaume-jete-du-louvre-pour-avoir-pris-des-photos-c-est-un-mepris-du-visiteur.html, consulté le 15.09.2020.

55Pour une critique de ces prtaiques voir notamment : (à compléter)

56Paris 18 février 1972 Bernard Buffet c. Compagnon de Marcheville RIDA juillet 1972 p. 214.

57L'utilisation privative du domaine public est constituée lorsque l'usage du bien dépasse le droit d’usage qui appartient à tous. (à compléter)

58Voir sur ce point la charte « Tous photographes du ministère de laCu lture » qui avait pour objectif d'inciter les musées à autoriser la prise de vue de leurs collections. Disponible sur … consulté le 20.09.2020.

59Voir les critiques du monopole de la RMN. (à compléter)

60CE, 29 oct. 2012, n° 341173, Ville de Tours c/ EURL Photo Josse : JurisData n° 2012-024329 n°341173 ; CE, 3e et 8e ss-sect., 23 déc. 2016, n° 378879, Cne Tours c/ Photo Josse. (à compléter avec les décisions des tribunaux d'instance et d'appel)

61Cette qualification a été critiquée par la doctrine administrative (voir référence) puisqu'elle ne se fonde pas sur les conditions de prise de vue, mais uniquement sur l'exploitation de l'image de celui-ci. Cette décision va à l'encontre de l'interprétation dans l'arrêt Kronenbourg-Chambord qui dans des circonstances similaires a refusé de reconnaître l'usage privatif (voir plus haut). L'articulation de ces deux arrêts est à préciser à l'avenir.

62Chercher l'arrêt de référence exacte. Voir aussi N. Foulquier, « Les photographies du domaine public mobilier », AJDA 2013 p.111 ( à revérifier la référence)

63Ajouter référence rapport de l'INHA